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23 mars 2022

Dominic Chamberland - dchamberland@lexismedia.ca

Adolescent tué par un autre à Vassan : entre l’accident et le meurtre

Neuf mois de garde pour l’accusé, témoignage poignant de la mère de la victime

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©Photo: Archives

Le dernier acte d’une histoire infiniment triste a été joué mardi, au palais de justice de Val-d’Or.

L’adolescent accusé de meurtre qui a plaidé coupable l’automne dernier à une accusation réduite d’homicide involontaire coupable pour avoir tué son demi-frère de 13 ans d’un coup de feu alors qu’il croyait l’arme déchargée, en juin 2020 dans une résidence du secteur Vassan, a été condamné à une sentence de neuf mois de garde ouverte assortie d’une probation de deux ans et d’une interdiction de possession d’armes pendant dix ans.

Basée sur les rapports pré-décisionnel, psychologique et psychiatrique confectionnés pour bien cerner le jeune accusé, cette sentence prononcée par la juge Marie-Claude Bélanger, de la Cour du Québec, Chambre de la jeunesse, découle d’une suggestion commune soumise au tribunal par les procureurs de la Couronne, Me Mélanie-France Tourigny et Me Jonathan Tondreau, et par l’avocat de la Défense, Me Pascal Jolicoeur, à la suite de négociations entre les deux parties. «Notre suggestion s’appuie énormément sur les trois rapports et la situation actuelle du garçon», a indiqué Me Tourigny durant l’audience sur la peine.

«Peu importe la peine qui est imposée, on ne peut pas réparer l’irréparable» - La juge Bélanger  

Psychothérapie

L’adolescent, qui avait 14 ans au moment du tragique événement et dont l’identité ne peut être dévoilée puisqu’il est d’âge mineur, devra purger sa garde chez de la parenté qui, selon ce qu’on a signalé en cour, l’a fort bien encadré tout au long des procédures. Le contenu de la sentence stipule aussi qu’il devra s’investir dans une psychothérapie pour apprendre à se responsabiliser, qu’il devra respecter un couvre-feu de 22h à 7h (sauf pour l’école, le travail ou des raisons médicales), fournir un échantillon d’ADN et effectuer 100 heures de travaux bénévoles en 12 mois au cours de sa probation.

«Une peine pour adolescent vise à favoriser la réadaptation et la réinsertion sociale du jeune contrevenant. La peine pour un mineur ne peut pas être la même que pour un adulte pour un crime semblable. Le système est différent, a expliqué la juge Bélanger. Peu importe la peine qui est imposée, on ne peut pas réparer l’irréparable. Cette peine peut sembler clémente pour les gens qui souffrent à cause de ce drame, mais pour rendre une sentence, il faut tenir compte de l’ensemble des circonstances et de la responsabilité morale de l’adolescent, sans tomber dans la démesure», a-t-elle souligné.

La magistrate estime que la suggestion des avocats est adéquate, considérant que le jeune accusé «est lourdement affecté par le décès de son demi-frère, qu’il a exprimé des remords sincères, qu’il a plaidé coupable, qu’il admet son manque de jugement et son geste irresponsable, qu’il doit continuer ses suivis psychologiques, qu’il s’est pris en main et qu’il a un plan de vie (il étudie pour obtenir un emploi) afin d’être un actif pour la société».

Un acte de négligence

Rappelons que selon le récit des faits rapportés à la cour en novembre dernier, lors du plaidoyer de culpabilité de l’accusé, le garçon de 13 ans a reçu une balle à la tête alors qu’il s’adonnait à un jeu de policier et de voleur avec son demi-frère, qui a appuyé sur la gâchette, convaincu que l’arme n’était pas chargée.

«Il est clair que selon la preuve dont nous disposons, l’accusé n’avait pas l’intention de tuer son demi-frère. Ce n’était ni un meurtre, ni un accident; on se trouve quelque part entre les deux, a mentionné Me Tondreau. Il s’agit d’un grand manque de jugement et d’un acte de négligence tel qu’il a été élevé au rang d’infraction criminelle. Malgré les conséquences horribles, on souhaite que le dénouement puisse apporter un peu de paix aux familles touchées. Il y a une grande dimension humaine, c’est un dossier aux circonstances particulières et la peine imposée est la mieux adaptée à celles-ci», a-t-il affirmé.

Haine, rage et colère

La mère de la jeune victime a tenu à prendre la parole lors de l’audience sur la peine, au risque, a-t-elle dit, que ça lui coûte sa vie familiale et conjugale avec le père de l’accusé. Un témoignage pour le moins touchant, poignant et bouleversant. Le jeune accusé lui-même était très ému en écoutant sa belle-mère s’exprimer. «La douleur est si atroce que je ne souhaiterais pas ça à mon pire ennemi, a mentionné la dame dont on doit taire l’identité pour préserver l’anonymat des mineurs impliqués dans l’affaire.

«À cause d’un geste négligent et irresponsable, une partie de moi a été arrachée et ma vie a basculé à tout jamais. Pour une bête idée de jouer à un jeu avec des vraies armes, j’ai perdu mon fils alors que l’accusé avait pleinement conscience des dangers. J’ai du mal à croire à un simple accident, puisque c’est arrivé malgré les mises en garde des parents. La mort de mon fils aurait pu être évitée. J’ai été témoin des comportements de l’accusé auparavant, mais ils ont toujours été rationalisés par son entourage. Ce n’est pas lui rendre service que d’excuser ses gestes, il doit apprendre à responsabiliser ses actions», a défilé la maman éplorée, en sanglots, dans une salle où la tension et l’émotion étaient à couper au couteau, en présence des deux familles concernées.

La dame a signalé que sa famille était démolie à tout jamais à cause de cette tragédie. «On n’est plus une vraie famille. Je suis remplie de haine envers le responsable de la mort de mon fils. Je me sens vide, je suis morte à l’intérieur, je vis sans vivre, c’est un cauchemar sans fin, a-t-elle lâché.

«Mais malgré ma douleur, quelque part derrière ma rage et ma colère se cache une part d’humanité qui cherche à compatir avec la souffrance de l’accusé. Lui aussi devra bûcher pour survivre à ça. Oui, ce serait une satisfaction pour moi qu’il se retrouve derrière les barreaux, mais aucune sentence ne soulagera ma peine, a enchaîné la dame avant de s’adresser directement à l’adolescent : «Accepte l’aide et travaille sur toi. Peut-être que le temps va régler des choses et que le pardon viendra, mais en attendant ce moment, prends bien soin de toi.»

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