Économique
Retour26 juillet 2023
Lucie Charest - lcharest@medialo.ca
Pénurie de la main-d’œuvre : c’est l’affaire de tous
Les entreprises témiscamiennes n’y échappent pas
©Gracieuseté - crédit : Jean-François Girard
Cathy Légaré est aux premières loges pour mesurer les impacts de la pénurie de main-d’œuvre, non seulement à titre d’entrepreneure, mais aussi à titre de présidente par intérim de la Chambre de commerce et de consommatrice.
Les résultats du récent sondage mené par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) sur la pénurie de main-d’œuvre au Québec sont loin d’être rassurants. Appelée à les commenter, la présidente par intérim de la Chambre de commerce Témis-Accord était déjà bien au fait de la situation.
« Le paysage entrepreneurial est en train de se transformer, et on ne sait pas jusqu’où ça va aller, a fait remarquer Cathy Légaré, présidente par intérim de la Chambre de commerce Témis-Accord et copropriétaire de casse-croûte La Gauloise à Ville-Marie. Juste en une semaine, trois entreprises viennent d’être mises en vente. »
D’après Mme Légaré, il n’est pas étonnant de voir autant de propriétaires d’entreprises de services ou de commerce se résoudre à passer le flambeau. Elle est aux premières loges pour en être témoin, à titre de membre de la Chambre de commerce, mais aussi en étant en contact avec une foule d’entrepreneurs qui viennent casser la croûte à son propre commerce.
Propriétaires brûlés
« Beaucoup de propriétaires d’entreprises sont brûlés, a-t-elle constaté. Ils doivent souvent tenir le fort de nombreuses heures supplémentaires par semaine. Il n’est plus rare de ne recevoir aucun CV lors d’un affichage de poste. Les ventes d’entreprises sont de plus en plus souvent liées à la pénurie de main-d’œuvre. Il est compréhensible que des propriétaires d’entreprises finissent par baisser les bras. »
En comparant les résultats de son sondage mené en 2021 à celui effectué cette année auprès des propriétaires d’entreprises québécoises, il est apparu clair à la FCEI que la proportion de propriétaires de PME qui ne croyaient pas à la survie de leur entreprise à long terme, en regard à la pénurie de main-d’œuvre, avait augmenté de 10 %, passant de 23 % à 33 %. Par contre, en ce qui a trait à l’impact de cette pénurie sur le moyen terme, soit entre un et quatre ans, la proportion des propriétaires inquiets est passée de 45 % en 2021 à 40 % en 2023.
Quoique le taux de propriétaires d’entreprises inquiets pour le moyen terme ait légèrement diminué en deux ans, cela n’a pas de quoi rassurer complètement François Vincent, vice-président pour le Québec à la FCEI. « Que près de la moitié des entrepreneurs québécois se disent à risque à moyen terme en raison des pénuries de main-d’œuvre, démontre comment cet enjeu met une pression énorme sur leurs dos, a-t-il fait observer. La bonne nouvelle, c’est que la pression diminue sur le court et moyen terme. On peut voir ici les effets positifs du travail des PME pour faire face à cet enjeu ainsi que les retombées des programmes gouvernementaux. L’enjeu reste de taille et urgent pour notre économie. Il faut poursuivre et accentuer les efforts. »
« Le paysage entrepreneurial est en train de se transformer, et on ne sait pas jusqu’où ça va aller » - Cathy Légaré
Faire sa part et adapter ses habitudes de consommation
Quoiqu’elle ait trouvé des solutions pour l’entreprise dont elle est la copropriétaire, Cathy Légaré ne se laisse pas bercer par un optimisme tranquille. « Tout le monde doit faire sa part pour diminuer la pression que les entrepreneurs subissent, a-t-elle fait remarquer. Ici, à la Gauloise, nous avons cinq employés à temps plein et 10 à temps partiel. C’est un peu plus complexe à gérer, mais il faut s’adapter si on veut garder nos employés. Et le consommateur doit aussi s’adapter. Par exemple, nous avons fermé neuf jours à la fin des classes, pour que nos employés puissent prendre des vacances en famille. Nous fermons à 20 h le soir au lieu de 22 h, même pendant la grosse saison touristique. Les clients n’aiment pas faire face à une porte fermée, mais ils comprennent et s’habituent. C’est la même chose pour tous. Moi-même, je faisais mon épicerie aux heures les moins achalandées, maintenant, certaines épiceries ferment plus tôt le soir, et si elles sont ouvertes le dimanche, c’est plus tard en après-midi. »
Recommandations
Au terme de l’analyse des données recueillies lors de son sondage, la FCEI a formulé plusieurs recommandations au gouvernement du Québec. Parmi celles-ci,
augmenter les crédits d’impôt pour améliorer les conditions de travail; bonifier les crédits d’impôt aux particuliers pour rendre le marché du travail plus attractif; diminuer les taxes et impôts des PME; faciliter le recrutement et réduire les délais de traitement des demandes d’embauche; aider à trouver des candidats dans sa région et ultimement, créer des programmes pilotes pour accélérer l’immigration dans des secteurs économiques touchés par des pénuries de main-d’œuvre.
La FCEI est le plus grand regroupement de PME au pays, comptant 97 000 membres dans tous les secteurs d’activité et toutes les régions. Son mandat vise à augmenter les chances de succès des PME en défendant leurs intérêts auprès des gouvernements, en leur fournissant des ressources personnalisées et en leur offrant des économies exclusives.
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